vendredi 29 janvier 2021

Ce genre de petites choses


 Résumé : 

En cette fin d’année 1985 à New Ross, Bill Furlong, le marchand de bois et charbon, a fort à faire. Aujourd’hui à la tête de sa petite entreprise et père de famille, il a tracé seul sa route : élevé dans la maison où sa mère, enceinte à quinze ans, était domestique, il a eu plus de chance que d’autres enfants nés sans père.

Trois jours avant Noël, il va livrer le couvent voisin. Le bruit court que les sœurs du Bon Pasteur y exploitent à des travaux de blanchisserie des filles non mariées et qu’elles gagnent beaucoup d’argent en plaçant à l’étranger leurs enfants illégitimes. Même s’il n’est pas homme à accorder de l’importance à la rumeur, Furlong se souvient d’une rencontre fortuite lors d’un précédent passage : en poussant une porte, il avait découvert des pensionnaires vêtues d’horribles uniformes, qui ciraient pieds nus le plancher. Troublé, il avait raconté la scène à son épouse, Eileen, qui sèchement lui avait répondu que de telles choses ne les concernaient pas.

Un avis qu’il a bien du mal à suivre par ce froid matin de décembre, lorsqu’il reconnaît, dans la forme recroquevillée et grelottante au fond de la réserve à charbon, une très jeune femme qui y a probablement passé la nuit. Tandis que, dans son foyer et partout en ville, on s’active autour de la crèche et de la chorale, cet homme tranquille et généreux n’écoute que son cœur.

 Mon avis : 

Ce genre de petites choses, un titre gentillet qui cache un roman terriblement d’actualité. Micheál Martin présentait ses excuses il y a quelques jours encore, pour les quelques 9000 enfants ayant perdus la vie dans  des orphelinats catholiques. Et combien d’autres maltraités, arrachés à leur mère célibataire pour être revendu aux Etats-Unis ou bien pire encore.

Nous sommes ici, transportés en 1985, Bill Furlong vends du bois et du charbon. Il a une vie paisible avec son épouse et ses cinq filles. Lors de livraisons au couvent, il va vite se rendre compte qu’il se passe des choses étranges derrière ses murs.

Ce roman est court, il se lit comme un conte de noël, et l’on ne fait qu’entrevoir la misère de ses pauvres femmes. Malgré tout, on ressort énormément secoués par cette lecture. En tant que lectrice encore plus d’ailleurs et l’on ne peut qu’être révolté par tout cela. L’état a couvert l’église catholique pendant si longtemps et ne commence seulement qu’à reconnaitre ses torts et a présenter des excuses au fur et à mesure que les choses sont révélées.

J’ai adoré les descriptions de la vie irlandaise qui est tellement réaliste. Malgré les années écoulées, j’ai trouvé que la vie n’avait pas trop changé. Je m’y suis vraiment vu, moi qui y séjourne depuis 2012.

Bill est un personnage touchant, peut-être un peu naïf, mais qui ouvre les yeux progressivement. Son épouse m’a un peu choqué, elle sait clairement ce qui ce passe au couvent mais choisit de fermer les yeux. C’était sans aucun doute très courant pour l’époque mais c’est extrêmement choquant trente ans plus tard.

Enfin, j’ai aimé retrouvé la plume de Claire Keegan. Ce n’est pas la première fois que je lis un de ses romans et je suis toujours conquise par son écriture simple, poétique et pleine de pudeur. 


 Extraits :

Y a-t-il quelque chose que je peux faire pour toi, a Leanbh ? demanda-t-il. Il suffit de me le dire.
Elle regarda par la fenêtre, respira et se mit à pleurer, comme les personnes inaccoutumées à la moindre gentillesse le font quand on leur en témoigne pour la première fois ou de nouveau.

 

A quoi bon être en vie si l’on ne s’entraidait pas ? Était-ce possible de continuer durant toutes les années, les décennies, durant une vie entière, sans avoir une seule fois le courage de s’opposer aux usages établis et pourtant se qualifier de chrétien, et se regarder en face dans le miroir ?

 

Noël révélait toujours et le meilleur et le pire chez les gens.


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire