mardi 11 janvier 2022

Trompe-l'œil

 

Résumé : 

Copenhague. Lukas, un écolier, a disparu. Pour tout indice : le profil Instagram du garçon, qui révèle sa passion pour la paréidolie, un phénomène qui donne l'impression de distinguer des visages sur des objets. Et cette photo, récurrente : la porte d'une grange. Qui Lukas y a-t-il vu? La photo permettra-t-elle de retrouver sa trace ? La journaliste Héloïse Kaldan et l'inspecteur Eric Schäfer remontent une piste aussi difficile qu'effroyable.

Mon avis : 

J’avais adoré Fleur de cadavre mais je dois avouer que Trompe-l’œil est encore meilleur. Une fois commence, impossible de lâcher ce roman et jusqu’à la dernière ligne Anne Mette Hancock va vous surprendre.

On retrouve avec plaisir les deux héros rencontrés lors de la précédente enquête : Héloïse Kaldan, la journaliste et Erik Schäfer le flic. Héloïse vit une période difficile dans sa vie personnelle et se jette dans le travail : un petit garçon disparu. Erik, lui rentre au Danemark après plusieurs semaines de vacances au soleil et a un peu de mal à retrouver la grisaille. Malgré tout, il va enquêter avec zèle pour retrouver Lukas.

J’ai beaucoup aimé l’intrigue qui est vraiment prenante. L’enquête est bien menée et j’ai aimé le coté humain des policiers qui passent a coté d’indices, qui font des erreurs. J’ai adoré la fin mais je ne peux pas en dire plus.

Le duo Erik et Héloïse est encore une fois à la hauteur. Erik est attendrissant et forme vraiment un beau couple avec son épouse. Héloïse est une femme qui fait de ses faiblesses des forces. Elle est indépendante et j’aime vraiment son personnage. J’espère vraiment qu’il y aura une suite.


Extraits : 

Il détesté le silence. L'attente l'avait toujours rendu nerveux. Elle lui donnait des aigreurs d'estomac. Il préférait l'action, le mouvement.



La température à Copenhague oscillait depuis plusieurs jours autour de zéro degré, mais la violence du vent donnait aux habitants l’impression de vivre l’hiver le plus froid du siècle. Les rues étaient désertes. On se serait cru dans une ville fantôme.

jeudi 6 janvier 2022

Madame Hayat


Résumé : 

Fazil, le jeune narrateur de ce livre, part faire des études de lettres loin de chez lui. Devenu boursier après le décès de son père, il loue une chambre dans une modeste pension, un lieu fané où se côtoient des êtres inoubliables à la gravité poétique, qui tentent de passer entre les mailles du filet d’une ville habitée de présences menaçantes.

Au quotidien, Fazil gagne sa vie en tant que figurant dans une émission de télévision, et c’est en ces lieux de fictions qu’il remarque une femme voluptueuse, vif- argent, qui pourrait être sa mère. Parenthèse exaltante, Fazil tombe éperdument amoureux de cette Madame Hayat qui l’entraîne comme au-delà de lui-même. Quelques jours plus tard, il fait la connaissance de la jeune Sila. Double bonheur, double initiation, double regard sur la magie d’une vie.

L’analyse tout en finesse du sentiment amoureux trouve en ce livre de singuliers échos. Le personnage de Madame Flayat, solaire, et celui de Fazil, plus littéraire, plus engagé, convoquent les subtiles métaphores d’une aspiration à la liberté absolue dans un pays qui se referme autour d’eux sans jamais les atteindre.

Pour celui qui se souvient que ce livre a été écrit en prison, l’émotion est profonde.

Mon avis : 

Premier coup de Coeur de cette année 2022, Madame Hayat est une petite pépite qui captive le lecteur dès les premières pages.

On fait la connaissance de Fazil, étudiant en littérature et désargenté à la suite du décès de son père. Pour joindre les deux bouts, il travaille comme figurant pour une émission de télé. Et c’est là qu’il fait la rencontre de Madame Hayat. Elle est tellement différente de lui, cinquantenaire épicurienne, sensuelle, riche et qui ne s’intéresse qu’aux documentaires animaliers diffusés à la télévision. Pourtant, ils vont former un couple qui se complète merveilleusement bien. Leur histoire est belle mais on préssent qu’elle ne pourra pas durer bien longtemps. En parallèle, Fazil rencontre Sila, son double féminin. Elle aussi est pauvre suite a un revers de médaille de son père. Elle aussi étudie la littérature, est érudite et s’attache à Fazil.

Le roman est puissant car la tension monte progressivement : entre les personnages, bien sûr, mais surtout c’est le climat de terreur qui s’installe dans le pays. De plus en plus de personnes sont emprisonnées tout autour de Fazil et plus personne ne se fait confiance. Cette tension est accentuée encore plus par le vécue de l’auteur qui a rédigé ce roman dans une prison. Il nous montre les difficultés des jeunes en Turquie qui perdent leur emplois, espoirs, avenir a cause de la répression.

J’ai adoré les personnages et comment l’auteur les avaient décrits. J’ai en effet, trouvé les personnages féminins très forts, déterminés dans leur choix, qui prennent les commandes. A l’inverse, Fazil est indécis, n’arrive pas à prendre des décisions.

C’est un roman initiatique magnifiquement écrit, une ode a la liberté qui a du permettre a l’auteur de s’évader mentalement de l’univers carcéral. Un trio amoureux superbement décrit et une fin qui m’a rendu heureuse.



Extraits : 

La vie ne sert à rien d'autre qu'à être vécue. La stupidité, c'est d'économiser sur l'existence, en repoussant les plaisirs au lendemain, comme les avares. Car la vie ne s'économise... Si tu ne la dépenses pas, elle le fera d'elle-même, et elle s'épuisera.



Mais on n’apprend pas grand-chose sur l’existence, dans les familles heureuses, je le sais à présent, c’est le malheur qui nous enseigne la vie.



- Et si demain vous aviez besoin de cet argent ?
- Et si demain je n'avais pas besoin de cet argent ?
- Vous seriez quand même plus tranquille...
- Et si être heureuse m'intéresse plus que d'être tranquille...



J’étais persuadé de la désirer telle qu’elle était, ni plus jeune ni plus belle. Je me souvenais de la phrase de Proust : Laissons les jolies femmes aux hommes sans imagination.

mardi 4 janvier 2022

Double vitrage

Résumé : 

Dans son petit appartement au centre de Reykjavík, une veuve de 78 ans contemple le monde à travers le double vitrage. Isolée et vulnérable, elle n’a pas d’autres perspectives que la solitude et la mort.
Mais un miracle se produit : un homme lui déclare sa flamme. Son existence se remplit de joie et d’espoir, tout comme de doutes et de craintes. Ont-ils le droit de s’aimer dans un monde qui tourne en dérision les dernières amours ? Trouveront-ils le courage d’aller à contre-courant des prescriptions de la société ? Et que peut encore offrir l’amour au crépuscule de la vie ?
Un roman délicat et poignant sur un sujet rarement abordé dans la littérature.

Mon avis : 

Un très court roman ou une longue nouvelle, il ne fait pas grand-chose pour faire une très belle histoire.

L’auteure aborde avec merveille la vieillesse et le temps qui passe mais surtout l'amour. Quand sommes-nous trop vieux pour tomber amoureux ? Voilà la question que pose Halldóra Thoroddsen avec Double vitrage.

Notre héroïne, une veuve de 78 ans va vivre un amour inattendu qui lui donne la légèreté des plus belles années. Mais l’amour chez les seniors reste un sujet tabou et mal vu et pas seulement en Iceland.

C’est un bel hommage à la vie, même si elle n'est pas parfaite et à l'amour de toute une vie. Jamais triste mais plutôt mélancolique, cette vieille dame regarde passer le temps par les fenêtres de son appartement avec en bruit de fond la radio allumée, le cliquetis des aiguilles à tricoter mais surtout son esprit clair regardant toujours vers l'avenir.






Extraits : 

Les amours des vieux ne sont pas les amours saines du mariage dont l’objectif est de peupler la Terre. Elles ne répondent pas non plus aux critères esthétiques, ni à la célébration des plaisirs de la chair dans l’esprit des gens, elles sont au contraire repoussantes lorsque la vieillesse transparente est impliquée. Même l’imagination devient timide à l’idée des corps secs et froissés de vieilles personnes se sautant l’une sur l’autre avec l’aide de lubrifiant. Le sexe est la seule chose qui leur vient à l’esprit, possédés comme ils le sont par cette unique vision des rapports humains. Les héritiers tremblent de nervosité. Les vieux amoureux ont parfois tendance à dépenser leur argent dans des délices futiles et à oublier leur rôle suprême dans la bataille pour la survie de leurs gènes.


L’odorat est devenu plus subjectif avec l’âge, il m’envoie constamment des parfums de ma jeunesse. J’ai probablement cessé de sentir le présent.