jeudi 26 août 2021

La fraternité


 Résumé : 

Pour élucider malgré lui le mystère d’un crime dont il ignore tout, un jeune homme se fait introniser dans le club le plus select de Cambridge. Sur fond de campus novel et d’amours impossibles, un premier roman vertigineux.

Mon avis : 

La fraternité est un roman allemand qui nous emmène à Cambridge, en Angleterre. On y fait la connaissance de Hans, un jeune homme qui a la suite du décès de ses parents se retrouve dans un pensionnat. Après, ses études secondaires, sa tante maternelle, lui propose d’entrer à Cambridge et d’infiltrer un club très select où se sont passé plusieurs crimes.

J’ai beaucoup aimé tout le mystère qui plane autour de ce club. La construction du récit est intéressante car nous apprenons les faits en même temps que Hans. L’auteur nous force donc à enquêter, à analyser chaque petit détail disséminé au fil des pages. J’ai aussi apprécié les chapitres courts ou alternent les différents protagonistes.

L’ambiance universitaire est très bien décrite et le récit est vraiment plaisant. On ne devine rien avant la fin et j’ai été choqué par les faits et surtout tant d’années de silence. Le récit aborde des thèmes qui sont malheureusement très présents dans l’actualité : privilèges sociaux, pouvoir, masculinité toxique. Ces thèmes sont très bien traités et le roman sonne vraiment juste. Ce club élitiste fait tout simplement froid dans le dos.

Le personnage de Hans est vraiment très attachant. C’est un garçon qui n’a pas eu la vie facile mais qui a su rebondir. Sa relation avec Charlotte est vraiment touchante. C’est un personnage aussi très intéressant et qui au fil du récit grandit et se pose les bonnes questions sur la responsabilité envers sa famille et ses amis mais aussi la loyauté et ses limites.



Extraits : 

Chelsea, ce sont des fenêtres inondées de lumières, de hautes haies, des allées de gravier blanc. C’est presque comme si on n’était pas à Londres. Je crois que c’est pour cette raison que j’ai toujours aimé être ici.
Avant l’internat, j’ai vécu dans une villa du Somerset. Le silence dans la nuit, le parfum des fleurs au matin, l’attente du jour où l’on presserait le raisin. Telle a été mon enfance.
À une époque, Londres, son béton et sa sarabande de lumières me rendaient dépressif. Le métro est le péché de la civilisation, on y est coincé comme un porc en route pour l’abattoir, on respire les vapeurs d’inconnus, il fait toujours trop chaud et il y a toujours quelqu’un pour éternuer. C’est le moyen de transport le plus grossier qui soit. Quand je pense aux visages des gens qui sortent des bouches de métro, mon humeur tourne toujours à l’aigre.
On dit que les Londoniens sont désagréables envers les étrangers. Je crois au contraire que les Londoniens sont des gens foncièrement sympathiques – jusqu’à ce qu’ils mettent les pieds dans le métro le matin et perdent la boule.




Longtemps avant cette soirée, quand je faisais mes premiers pas en boxe, j’avais appris que ce n’étaient pas les coups qui faisaient mal – les os du crâne sont solides –, mais l’humiliation, et comme j’étais plutôt petit, comme personne ne pensait que je pouvais vaincre un type de cent kilos en blazer bleu pâle, j’allais forcément gagner. Bien boxer quand on a peur, c’est difficile.




« [...] Il n’y a que deux catégories de gens à Cambridge. Ceux qui sont riches jusqu’à l’absurde, et ceux qui essaient de paraître plus riches qu’ils ne le sont. Parfois, je me dis que je suis le seul à être normal, ici », a-t-il dit.





Dans la cour, devant son bureau, les pavés avaient l’air d’avoir été posés au Moyen Âge, ce qui devait même être le cas. Au cours des siècles, le cuir durci de milliers de semelles d’étudiants en avait poli et arrondi chaque aspérité. J’étais resté dehors pendant une demi-heure, appuyé contre un mur, et j’avais observé les étudiants, qui ressemblaient à mes camarades d’internat. En les regardant, je n’avais rien vu en eux qui les unisse ni les distingue. Il y avait des étudiants à la peau sombre, des Asiatiques, des Blancs, des jeunes gens en pantalon de coton informe, en jupe courte, en costume, avec des sacs à dos, des attachés-cases, des sacs en toile ou des livres à la main. Je m’étais tout d’abord dit qu’il n’y avait pas de profil type de l’étudiant de Cambridge, puis j’avais remarqué que certains, les hommes surtout, levaient le menton un peu plus haut que ce à quoi j’étais habitué : ils semblaient savoir un peu mieux que les autres qui ils étaient, c’était du moins l’impression qu’ils m’avaient donnée.





Deux semaines plus tard, assis dans un bureau qui donnait sur la cour de la chapelle du St John’s College, à Cambridge, j’observais, derrière Alex, un tableau accroché au mur. Je me demandais si les vieux tableaux s’assombrissaient au cours des siècles ou s’ils avaient été peints ainsi.





Mes parents me manquaient, la maison, l’odeur du vieux plancher, les meubles que mon père avait construits, chaque recoin de mur frais auquel je rattachais un souvenir. C’était un peu comme la faim que j’avais éprouvée avant un combat de boxe, quand j’avais dû jeûner pour perdre deux kilos et
atteindre le poids de ma catégorie. La faim faisait un trou au niveau du ventre. La solitude me faisait un trou dans tout le corps, comme s’il n’était resté de moi que l’enveloppe vide d’un être humain.

mercredi 25 août 2021

Premier sang


 Résumé : 

« Il ne faut pas sous-estimer la rage de survivre. » Amélie Nothomb


Mon avis : 

Une rentrée littéraire sans un nouveau roman d’Amelie Nothomb c’est comme un été sans soleil. Et comme chaque année, je suis au rendez-vous et ce roman m’a beaucoup plu.

Amélie se glisse dans la peau de son père pour lui rendre un très bel hommage. Elle nous raconte, a la première personne du singulier, son enfance, adolescence et ses premières années en tant que diplomate où il est pris en otage au Congo.

On parle souvent de l’humour britannique mais on oublie à quel point les Belges sont très forts dans ce domaine. Car ce roman, malgré la récente disparition de Patrick Nothomb, est truffé d’humour. On sourit et même parfois rit franchement des péripéties du jeune homme. On comprend aussi bien mieux le coté déjanté de l’auteure face a cette famille hors du commun.

Le style si particulier de l’auteure et les thèmes qui lui sont chers notamment l’enfance de Patrick tiennent une place très importante dans le livre. Elle analyse comment son père s’est forgé en tant qu’homme et diplomate et nous livrant cette enfance parfois, voir même souvent difficile.

En revanche, comme toujours le roman est beaucoup trop court. Lu en à peine deux heures, il va falloir à nouveau attendre aout 2022 pour un nouveau roman. 




Extraits : 

Chaque fois que je ne craignais pas de le déranger, je prenais André contre mon cœur. Le mystère renaissait à chaque étreinte : un gouffre d’amour, aussi vide que plein, me déchirait la poitrine. C’était une gigantesque interrogation : la paternité était ma vocation, je le sentais et, pourtant, je n’avais aucune idée de ce en quoi elle consistait.
Je comptais sur le bébé pour me l’enseigner.



Un diplomate ne part pas aussitôt à l’étranger. Il passe d’abord deux ans à travailler au ministère des Affaires étrangères, histoire d’apprendre qui seront ses interlocuteurs pendant les quarante années à venir.


Dans les années 50, ces milieux, en Belgique, étaient aussi codifiés que la cour de Henri III. Je dus attendre que Danièle ait dix-huit ans et « fasse son entrée dans le monde » pour la courtiser de manière officielle.


De ce que j’avais connu en six années et demie d’existence, ces vacances de Noël furent ce qui ressemblait le plus au bonheur. Les jours passés à patiner sur le lac blotti dans la forêt ou à fouler la neige des chemins m’éblouissaient sans relâche. Appartenir à une bande d’enfants ne cessait de m’exalter.


Les quatre heures de train me parurent féeriques. À mesure que nous nous enfoncions dans les Ardennes, l’épaisseur de la neige augmentait. La forêt supportait un tel poids de blancheur que certains arbres baissaient les bras, comme moi avec ma valise.


Deux années plus tôt, il avait épousé Claude, ma mère. C’était le grand amour comme on le vivait en cette Belgique des bons milieux qui évoque si singulièrement le dix-neuvième siècle : avec retenue et dignité. Les photos montrent un jeune couple se promenant à cheval en forêt. Mes parents sont très élégants, ils sont beaux et minces, ils s’aiment. On dirait des personnages de Barbey d’Aurevilly.

Un jour nous nous raconterons tout

 

Résumé : 

Saxe, Allemagne de l'Est. Au lendemain de la réunification, Maria Bergmann, 16 ans, a quitté la maison de sa mère divorcée pour venir vivre, à quelques kilomètres, dans la ferme familiale de son petit ami Johannes Brendel, qui a 2 ans de plus qu'elle. Peu à peu, elle se rend indispensable dans cette famille qui l'accueille à bras ouverts. Jusqu'au jour où, contre toute attente, Maria tombe éperdument amoureuse de Henner, fermier solitaire, aussi bourru qu'il est cultivé, de 20 ans son aîné.
Ils entretiennent une liaison secrète, passionnée et d'une intensité stupéfiante qui va transformer Maria, notamment par sa découverte du plaisir féminin. Cette liaison ne sera pas sans conséquences...

Mon avis : 

Un jour nous nous raconterons tout est un très beau roman initiatique ou le temps d’un été Maria va découvrir l’amour, devenir femme et grandir.

Concernant l’intrigue, il ne se passe pas grand-chose dans ces pages, c’est le quotidien banal de Maria qui vit dans une ferme rurale en Allemagne de l’est. Les journées se déroulent lentement, on travaille dur pour faire tourner la petite boutique, pour nourrir tout le monde. Maria vit un amour de jeunesse avec Johannes mais fait vite la connaissance de Henner, quarante ans qui va devenir bien plus pour elle.

Le lecteur passe par tous les sentiments pendant la lecture car c'est une histoire incroyablement poignante, dramatique, dérangeante, incompréhensible et émouvante. La relation entre Maria et Henner occupe une grande partie du roman. Celle-ci est discutable à plusieurs niveaux : d'une part il y a l'aspect de la grande différence d'âge, qui détermine le rapport de force entre les deux et qui est plus que mal vu aux yeux de la société. D'autre part, le lien entre cette jeune fille de 16 ans et cet homme de 40 ans est également caractérisé par la violence et la douleur. L'auteure laisse le choix de ce qui est répréhensible et de ce qui ne l'est pas aux personnes qui tiennent le livre entre leurs mains. D'un autre côté, j'ai trouvé l'obsession qui se développe entre Henner et Maria excitante à suivre : j’en avais mal pour eux deux. La différence d'âge, les actes sexuels sont brutaux et violent. Et pourtant, comme Maria, vous avez hâte que les deux se retrouvent.

J’ai beaucoup aimé l’ambiance post chute du mur de Berlin et les descriptions de l’ouest et de l’est sont fascinantes. L'auteure donne, malgré tout, à la fois un aperçu de la vie du village est-allemand peu avant la réunification, les inquiétudes et les besoins de la population, mais aussi l'anticipation et le regard sur l'avenir incertain. Le contexte historique dans lequel se déroule l'histoire est intéressant, mais pas toujours assez développé pour les non-allemands.

Enfin cette fin a été une grosse claque que je n’avais absolument pas vu venir Est-ce que ca pouvait finir autrement, certainement pas mais ca reste d’une terrible tristesse.




Extraits : 

Je suis couchée dans l’herbe derrière la scierie. Les mots du livre dansent et se brouillent.
Voila que le sommeil me prend comme un voleur, il descend du ciel voilé et pèse lourdement sur mon corps saccagé par l’amour. Les mains de Henner sont là de nouveau – rudes, douces, brutales, exigeantes, et j’ai envie d’elles.


En entrant, je cours vers lui et me jette à son cou. Et là, je pleure au moins autant que ma mère. Je crois, même encore bien davantage. En ce moment, il est tout pour moi, un père, une mère, mon amant et mon ami, et aussi un peu mon ennemi.



Hartmut est assis à côté de Frieda et lui tient les mains. Cet instant leur appartient, à eux seuls. Dans ce geste muet, il y a toute la souffrance d’avoir cru le fils perdu et toute la joie qu’il soit revenu.

jeudi 19 août 2021

Le diable de la Tamise

 

Résumé : 

Londres, 1889. Quand une victime du choléra est retrouvée dans la Tamise, le Dr Anton Kronberg, bactériologiste de son état, est appelé pour confirmer les causes du décès. Toutes les précautions sont prises pour éviter une épidémie. Les choses auraient pu en rester là si les résultats intrigants de l'autopsie n'avaient poussé Kronberg à s'intéresser de pus près à cette affaire. Alors que Scotland Yard souhaite classer le cas, Kronberg se rapproche de Sherlock Holmes. Et il ne faut que peu de temps au célèbre détective pour percer le secret du médecin qui, en réalité, est... une femme. Un secret qui pourrait la mener droit en prison s'il venait à être révélé. Mais tous deux vont unir leurs forces pour débusquer un criminel aussi redoutable que Jack l'Eventreur...

Mon avis : 

Le diable sur la Tamise est un très bon policier historique que je suis contente d’avoir découvert. Il s’agit du premier tome d’un saga et c’est une bonne entrée en matière malgré quelques défauts.

On fait la connaissance d’un personnage atypique : Anna qui se travestie en homme et devient Anton, pour pouvoir exercer son métier de médecin. C’est une femme résolument moderne pour l’époque, elle exerce une profession masculine comme je le disais précédemment mais elle n’est pas mariée et entretient une aventure avec un homme. C’est le coté plus moralisateur qui m’a dérangé : l’auteure veut en effet, un personnage fort, qui se bat contre toutes les injustices du monde. Le manque de soin, de propreté, la famine et les conditions de vie difficiles dans les bas-fonds londonien, mais aussi le fait d’être une femme dans un monde d’hommes. Pourtant, j’ai souvent eu l’impression qu’Anna n’était pas aussi droite et parfaite. Elle a des réactions extrêmes, poussée par l’impulsivité. Son passé la hante beaucoup mais nous apprenons les détails qu’au compte-goutte.

Bien évidemment, l’intérêt du récit repose aussi sur la présence du Docteur Watson et surtout de Sherlock Holmes. Je n’ai pas l’habitude de retrouver ces deux personnages étant plus familière avec les Austenneries. J’ai été ravie de les retrouver mais j’ai trouvé Holmes un peu fade.

L’intrigue est intéressante, bien construite même si au départ, on se demande un peu ou l’on va puisque notre duo enquête en sous-main, loin des policiers. Le suspense grandit au fil des pages et le roman se dévore.

L’auteure dresse, par contre, un portrait saisissant de Londres a la fin du XIXe. On frémit, on tremble à l’évocation d’un simple coin de rue mal éclairé, on se révolte face aux inégalités, a la promiscuité et à la misère de l’époque. Les épidémies sont fréquentes et touchent toujours les plus démunies en priorité.

En parlant de maladie, le lecteur n’est pas épargné par les descriptions bien croustillantes d’autopsies notamment. Ames sensibles s’abstenir.

Enfin, je dirai que le livre est trop court et manque un peu de profondeur mais il s’agit uniquement d’un tome un et j’imagine que la suite doit apporter un plus en termes de personnages et d’intrigues.





Extraits : 

Watson commença à s’agiter.
- L’un d’entre vous pourrait-il avoir l’obligeance de m’expliquer pourquoi le Dr Kronberg est une femme, et pourquoi vous enquêtez sur une affaire ou, de toute évidence, aucun crime n’a été commis ?



Londres était un monstre aux nombreuses têtes, ou plutôt aux nombreux visages. On pouvait se promener dans une rue propre et animée et. En s’engageant par erreur dans un chemin de traverse, se perdre dans un dédale de ruelles sombres et crasseuses qui abritaient des millions de rats énormes. Les rongeurs étaient les seuls ou presque à prospérer dans les taudis, car c’étaient les seuls occupants à avoir toujours assez à manger, que ce soir du chou fermenté, des excréments, ou des cadavres d’humains ou d’animaux. Une personne étrangère a ces lieux risquait fort de ne pas en revenir vivante, ou a tout le moins de se faire agresser ou rouer de coups. Il était très difficile de s’y procurer de l’eau potable, de la nourriture, un logis, de quoi se chauffer pendant l’hiver, des vêtements, enfin tout ce qui rendait la vie tolérable. A l’autre extrémité de l’échelle se trouvaient les quartier propres et paisibles de la haute société. Des dames et des messieurs élégamment vêtus, aux manières distinguées, pouvaient flâner tranquillement dans des parcs sans être importunés par des pauvres malodorants. Même les arbres et les buissons avaient un aspect soigné. Ces gens-la mangeaient à leur faim, même si ce n’était pas toujours le cas de leur domestique.
Tous les jours, le trajet entre mon domicile et l’hôpital m’amenait à traverser ces quartiers si contrastés de Londres.


Comme cela se produisait avec une certaine fréquence, j’avais le plaisir de travailler à l’occasion avec les inspecteurs de la police métropolitaine. C’était un groupe d’hommes fort divers, a l’esprit aussi affuté qu’un couteau à beurre pour les meilleurs d’entre eux, et digne d’une prune pourrie pour les plus médiocres.



Amusée, je songeai a un proverbe irlandais : « Si on n’en guérit avec du beurre et du whisky, c’est qu’il n’y a pas de remède pour ça » ; je me dis que je devrais peut-être essayer ce nouveau traitement avec mes patients.



Une des premières choses que j'ai apprises en tant qu'adulte, c'est que, pour les gens qui ont toujours vécu dans la peur et les préjugés, la connaissance et les faits n'ont strictement aucune importance.

lundi 9 août 2021

Not a happy family


Résumé :

Every family has its secrets. Fred and Sheila Mercer have worked hard their whole lives. And it's paid off. They have a beautiful house in the dream neighbourhood and their three adult children have always had everything they could have wished for. The family has had it good. But now, after a family dinner, the Mercers are dead. Murdered. Their children are devastated, aren't they? Even as they are set to inherit millions. Surely a stranger is responsible and not one of them . . . This family's secrets are deadly.

Mon avis : 



Not a happy family est sans aucun doute le meilleur roman de Shari Lapena que j’ai pu lire jusqu’à présent.

On fait la connaissance de Fred et Sheila Mercer qui s’apprête à réunir leurs enfants, aujourd’hui adulte, pour le traditionnel repas du dimanche de Paques. Repas qui tourne vite au vinaigre car Fred annonce son intention de vendre la maison familiale. Cela déclenche une dispute et les trois enfants quittent la table rapidement. Deux jours plus tard, ils sont retrouvés assassinés par leur femme de ménage. Est-ce un simple vol qui a mal tourné ou est-ce qu’un des enfants a assassiné ses parents ?

C’est un roman au suspense incroyable car plus on avance, plus la tension est palpable. C’est comme un huis-clos familiale ou tout le monde est suspects. L’auteure nous entraîne sur de nombreuses fausses pistes et jusqu’au bout nous avons des doutes. Ce n’est que dans les vingt dernières pages que l’on découvre l’identité du meurtrier.

J’ai beaucoup aimé les personnages des enfants Mercer, Catherine, l’ainée qui est très à cheval sur les apparences. Elle aime l’argent et ne cache pas sa volonté de s’installer dans la maison familiale. En même temps, elle est attendrissante à cause de son désir d’enfant. Son mari Ted est sans doute le plus sensé dans cette famille ou tout le monde cache bien des secrets. Ensuite, il y a Dan, le looser de la famille, celui qui fait des mauvais choix et que son père rabaisse constamment. Enfin Jenna, l’artiste incomprise, celle qui se rebelle contre cette oligarchie. Autour gravitent trois autres personnages : Audrey la sœur de Fred qui enquête, Irina, la femme de ménage mais aussi Rose et sa mère Ellen qui sont plus proche des Mercer que le début du roman ne le laisse entendre. Et puis il y a les deux enquêteurs zélés qui ne lâchent rien. Pour autant, ils sont très peu présents dans le domaine intime. On ne sait rien deux, ils sont juste là pour mener l’enquête. L’accent de l’intrigue tourne autour de cette famille dysfonctionnelle.

C’est un roman vraiment efficace, habillement construit qui est difficile à lâcher une fois que l’on a débuté sa lecture. L’auteure place une nouvelle fois son intrigue dans la petite ville banlieue de New-York, Aylesford sur les rives de l’Hudson, tout comme son autre roman Une voisine encombrante. J’ai aimé ce dépaysement et je recommande vraiment ce roman qui j’espère sortira prochainement en français.





Extraits : 

Irina rises and hugs Jenna as well. Audrey folds her arms across her chest. She looks like she’s irritated at the sight of Jenna, but still, she seems – triumphant. What’s going on here?
Lisa brings in another chair from the dining room, and Jenna sits down.
A tense silence has fallen over the room. Catherine says, ‘Audrey was just telling us that Dad changed his will before he died’




Dan Merton shrugs on a navy blazer over an open-necked pale-blue dress shirt and a smart pair of dark jeans. He studies himself critically in the full-length mirror in the bedroom.
Behind him his wife, Lisa, says, ‘Are you ok?’
He smiles wanly at her via the mirror. ‘Sure. Why wouldn’t I be?’
She turns away. He knows she doesn’t relish the prospect of Easter dinner at his parents’ house any more than he does. He turns around and looks at her – his pretty, brown-eyed girl. They’ve been married four years, and in that time there have been challenges. But she has stood by him, and he knows he’s lucky to have her. She is his first experience of unconditional love. Unless you count the dogs.




But he knows his wife. She’s like a dog with a bone when she’s got something on her mind. She won’t let it go. She gets a bit obsessive about things. Like pregnancy. But he’s heard that many women get like that when they can’t conceive. It’s a fixation with a ticking clock attached.
He thinks about what it’s been like for her the last few months. The cycle monitoring – running into the fertility clinic first thing in the morning, before work. Having her blood taken, her egg follicles monitored. His own role hasn’t been as onerous, only the awkwardness of providing a semen sample for testing. The first three months of cycle monitoring, armed with the knowledge of perfect timing, they had done it the old-fashioned way – at home in bed. But last month they stepped it up. It was the first time they tried artificial insemination. He hopes it works and these interventions can stop soon, rather than becoming even more intrusive. If nothing else, it’s messing up their sex life.

mardi 3 août 2021

Et le chêne est toujours là

 

Résumé : 

Un divorce douloureux fragilise Esther et les week-ends sans son fils sont durs à vivre. Pour se consoler quand elle est seule un samedi sur deux, Esther va s'asseoir sur un banc proche d'un superbe vieux chêne, au bord d'un lac près de chez elle. Un jour, une certaine Ruth y est assise et semble l'attendre. C'est une vieille dame d'un optimisme incroyable sur la vie. Ruth se met à dévoiler sa jeunesse à Esther, fascinée, et une jolie amitié naît.
Mais il pourrait y avoir des apparences trompeuses. Quels secrets Ruth semble-t-elle garder ? La réponse à cette question mènera Esther vers un long périple, jusqu'au lac de Côme, où elle comprendra que le passé de Ruth est bien plus sombre qu'annoncé. Et le chêne est toujours là est un roman saisissant et d'une grande tendresse sur la solitude, la résilience et la force de l'amitié, peu importe la différence d'âge et d'origine.

Mon avis : 


Il y a longtemps que je veux lire un roman de Sofia Lundberg et je suis contente d’avoir enfin franchi le pas avec ce merveilleux roman.

Avec Et le chêne est toujours là, nous faisons la connaissance d’Esther, une jeune femme divorcée qui souffre des séparations d’avec son fils lorsqu’il se rend chez son papa. Une semaine sur deux, elle se morfond, se nourrit à peine et rasasse le passé. Pour elle, c’est très dur de tourner cette lourde page, de faire le deuil de son amour perdu pour son ex-époux qui semble si parfait aux yeux de tout le monde. C’est à ce moment-là qu’elle fait la connaissance de Ruth, une vieille dame qui s’assoit sur un banc et avec qui elle papote. Ruth, lui raconte son histoire d’amour et ses souvenirs et va inconsciemment aider Esther à enfin être elle-même.

C’est une très belle histoire d’amitié qui unit ces deux femmes, de deux générations différentes mais qui pourtant ont tellement en commun. J’ai adoré la construction du roman et comment les deux histoires sont amenées : celle d’Esther, on l’apprend en lisant son journal ou elle couche ses pensées sur le papier pour comprendre ce qui n’a pas fonctionné dans sa relation avec Alex. Ruth aussi a écrit un journal et elle demande à Esther de lui en lire des passages pour se remémorer son passé puis ensuite c’est au coté d’Esther que l’on va remonter le temps et apprendre à connaitre Ruth.

J’ai adoré voyager entre la Suède et l’Italie, le froid de l’hiver nordique puis le printemps ou renait la nature et ou la prairie est en fleur et la chaleur des bords du lac de Come. Les personnages que l’on croise ont tous un élément charmant, sont tous plein d’une sagesse et d’une richesse dont Esther a besoin pour se reconstruire. C’est une très belle leçon de vie.

Ce roman éveillera une flopée de sentiments auprès des lecteurs, une ribambelle d’émotions positives qui font tellement de bien par les temps qui court. C’est le genre de lecture qui donne le sourire et qui met du baume au cœur. Je suis vraiment conquise et il me tarde de découvrir les autres romans de l’auteure.


Extraits : 

Esther contemple longuement le visage de la vieille dame sur le dessin, les rides sous ses yeux et sur ses joues qu’elle a consciencieusement tracées au crayon a papier.
« Ses pommettes n’étaient pas aussi hautes », dit-elle au bout d’un moment en passant l’index sur les joues et en les estompant légèrement.
« Et ses rides de rire étaient plus profondes, son visage plus joyeux. »
Simona se penche au-dessus du dessin, le menton dans ses mains.
« Mhm », commente-t-elle.
« Et les cheveux sont ratés aussi. Les siens étaient beaucoup plus jolis.
- En fait, tu la vois différemment, maintenant que tu sais qu’elle est décédée ? » dit Simona en se rasseyant au fond de sa chaise. Elle remonte ses genoux et les enveloppe dans son ample jupe a fleurs.
« Qu’est-ce que tu veux dire ?
- JE veux dire que la mort efface certains détails, en renforce d’autres. Elle va devenir de plus en plus belle dans ton souvenir, tu verras. Tu devrais la redessiner, je trouve. »
Esther range le dessin dans la chemise plastifiée.
« Alors il vaut mieux que je fasse attention a celui-ci, dit-elle. C’est la vraie Ruth que j’aimais. »



Je suis lasse de ressasser mes souvenirs, mes peurs et ces sentiments qui m’animent et qui jettent un voile sur tout ce que je vis. Tout ce que j’entends. Tout ce que je ressens. Je suis devenue incapable d’objectivité.
Pourtant, j’aimerais vraiment comprendre comment nous en sommes arrivés là. Pourquoi notre histoire a aussi mal tourné. Alors qu’elle était si belle à tant d’égards.


Elle contemple le lac. C’est si beau. La végétation autour. Les maisons pittoresques. Les fleurs. Tout cela devait manquer à Ruth. L’hiver suédois est si froid, si sombre et si gris. C’est étrange qu’elle ait fait le choix de rester là-bas au lieu de revenir en Italie. Mais après tout, l’hiver est peut-être aussi triste ici. Peut-être les habitudes et les souvenirs de notre enfance nous manquent-ils, ou qu’on se trouve.




« Tu sais quel est le problème avec les salauds ? dit Ruth tout à coup.
- C’est qu’ils sont des salauds, non ?
- Pas du tout. Le problème avec les salauds, c’est qu’ils pensent être des gens bien. Ils en sont convaincus. Et pour peu qu’ils soient malins, ils parviennent même à en convaincre leur entourage. »



Une bonne odeur de cuisine flotte dans la maison. Le jambon est au four, sauces et légumes mijotent. Sa mère s’active du réfrigérateur au plan de travail, et du plan de travail a la table. Elle dispose la charcuterie sur un plat, découpe la salade, écale des œufs. Elle est sans cesse en mouvement. Son père n’est jamais loin, toujours prêt à lui donner un coup de main si nécessaire.
Esther les regarde, debout l’un à côté de l’autre, la main ridée de son père posée dans le creux du dos de sa mère. Ils vivement ensemble dans cette maison depuis quarante ans. Ils sont sa famille, et un havre de paix ou venir se mettre à l’abri.



J’ai lu quelque part qu’il est plus facile de traverser un deuil qu’une séparation. Cela peut paraître surprenant. Mais dans une séparation, il y a toujours un « et si » et un « mais ». Alors qu’un décès est définitif. Et qu’en général, ce n’est la faute de personne. Tandis qu’une séparation est comme un abcès plein de pus, qui ne guérirait jamais. Une grosse pustule qui crève parfois, laissant s’écouler une peine visqueuse.
Aurait-ce été plus facile si l’un d’entre eux était mort ? Comment puis-je penser ainsi ? Quel égoïsme. Je ne veux pas qu’Adrian meure, jamais. Alex non plus. Si quelqu’un devait mourir, ce serait moi. Parce que j’ai détruit cette famille. Parce que j’ai fichu en l’air l’enfance d’Adrian et qu’à cause de moi, il est maintenant l’un de ces pauvres gosses déracinés, obligés de changer de maison toutes les semaines.