Résumé : « Bad-jens : mot à mot, mauvais genre. En persan de tous les jours: espiègle ou effrontée. »
Chiraz, automne 2022. Au cœur de la révolte « Femme, Vie, Liberté », une Iranienne de 16 ans escalade une benne à ordures, prête à brûler son foulard en public. Face aux encouragements de la foule, et tandis que la peur se dissipe peu à peu, le paysage intime de l’adolescente rebelle défile en flash-back : sa naissance indésirée, son père castrateur, son smartphone rempli de tubes frondeurs, ses copines, ses premières amours, son corps assoiffé de liberté, et ce code vestimentaire, fait d’un bout de tissu sur la tête, dont elle rêve de s’affranchir. Et si dans son surnom, Badjens, choisi dès sa naissance par sa mère, se trouvait le secret de son émancipation ? De cette transformation radicale, racontée sous forme de monologue intérieur, Delphine Minoui livre un bouleversant roman d’apprentissage où les mots claquent pour tisser un nouveau langage, à la fois tendre et irrévérencieux, à l’image de cette nouvelle génération en pleine ébullition.
Mon avis :
Le dernier roman de Delphine Minoui se déroule en 2022, où nous faisons la connaissance de Zahra surnommée Badjens, une jeune fille de seize ans. Ça pourrait être le récit de n’importe qu’elle adolescente, mais cette dernière vit en Iran ou la condition des femmes se dégrade de jours en jours.
C’est un récit incroyablement bien écrit et on éprouve de l’admiration pour toutes ces femmes pleines de courage qui doivent subir l’oppression. Un récit incroyable qui montre que les toutes petites choses de notre quotidien doivent être fait clandestinement là-bas : aller sur les réseaux sociaux, regarder un film sur Netflix, se maquiller, chanter, porter des vêtements de couleurs, boire un verre de vin, écouter de la musique…. C’est un cri de révolte, sur un sujet terriblement d’actualité depuis la mort de Mahsa Amini et de bien d’autres femmes.
C’est aussi superbement écrit, des phrases chocs, des retours à la ligne sans cesse, comme un discours clamé haut et fort mais où l’on peine à reprendre sa respiration entre chaque phrase. Je découvre pour la première fois la plume de l’auteure mais j’ai déjà l’envie de découvrir un autre de ses romans tant celui-ci m’a touché.
Femme, vie, liberté à toutes les femmes iraniennes mais aussi a toutes les femmes opprimées dans le monde.
Extraits : "Je repense à ces livres achetés avec ma mère à Téhéran. A ceux dont certaines pages ont été déchirées. A force d'être censurés, ils ne font plus aucun sens.
C'est ça aussi le féminin.
A force de l'effacer, la femme devient un non-sens.
Maman dit qu'on a deux cerveaux, un pour réfléchir et l'autre pour le reste.
J'ai envie du reste.
Envie de me rappeler que j'ai un corps, d'être sensuelle, de sentir que j'attire, d'être désirable et de désirer. Hommes, femmes, qu'importe. Les portes du monde sont multiples.
A chacun(e) son chemin.
Je hais la neutralité.
Je hais les mots qui nous gomment. Les virgules qui nous éclipsent, les points qui nous condamnent.
Je hais le monde au masculin."
"Sur le tombeau de Mahsa Amini, ses parents ont écrits :
Tu n'es pas morte. Ton nom est devenu un mot de passe.
Sur ceux de Hadis, 20 ans, Nika, 16 ans, Sarina, 17 ans, Hamid Reza, 20 ans, Mehrshad, 19 ans, ou encore Mohammad Hassan, 26 ans, la foule a dansé et chanté pendant les funérailles.
Nos martyrs à nous n'ont pas de barbe.
Ils ne rêvaient pas d'épouser des vierges au paradis.
Nos martyrs rêvaient d'un travail, d'une vie decente, du jour où les filles pourraient êtres fières de leur chevelure.
"Ne lisez pas le Coran, ne soyez pas tristes. Ne faites pas la prière et écoutez de la musique", a déclaré l'un d'eux avant d'être pendu."